La lecture de ce livre est assez édifiante par ce qu'elle traduit de la manière de concevoir le monde de l'entreprise et des affaires (et le monde tout court) il y a plusieurs décennies (années 30). Conception qui trouve encore une belle réalité aujourd'hui.
Parmi les centaines d'aphorismes (et autre petits essais [plutôt longuets]), j'en ai retenu un petit nombre que voici. Souvent ironiques, toujours perspicaces.
Je vous laisse vous en amuser, voire réfléchir à leur pertinence actuelle.
« (tout se paie). Il y a deux monnaies : l'argent et la satisfaction de vanité. Si vous avez le choix, et si vous êtes débiteur, payez en vanité, car c'est une monnaie que vous émettez vous-même et dont l'émission n'a pas de plafond. Si vous êtes créancier, choisissez l'argent : vous aurez le reste de surcroît. » (p34)
« Un journal ne peut écrire : " N'achetez pas les produits de la Maison Carrée, ils ne valent rien ", ce serait de la diffamation.
Mais certains journaux écrivent : " N'achetez pas les actions de la Maison Carrée, elles ne valent rien ", parce que çà, c'est de l'information financière. » (p35)
« Un aventurier est toujours de bas étage. S'il était de haut étage, ce serait un homme d'affaires. » (p35)
« En affaires, mentir n'est jamais nécessaire, est rarement utile, est toujours dangereux. » (p73)
« Un homme est vieux à partir de l'heure où il cesse d'avoir de l'audace. » (p75)
« Les hommes se répartissent naturellement en trois classes : les vaniteux, les orgueilleux et autres.
Je n'ai jamais rencontré les autres. » (p76)
« Tout est bon à la vanité : elle accepte la moindre aumône. Rien ne suffit à l'orgueil. » (p80)
« On croit d'abord qu'on travaille pour soi ; on se figure ensuite qu'on travaille pour sa femme - on est persuadé plus tard qu'on travaille pour ses enfants ; on s'aperçoit en fin de compte que, pendant tout le temps, on a travaillé pour travailler. » (p85)
« En affaire comme ailleurs, entre deux solutions qui paraissent indifférentes, c'est le sentiment qui décide. Le déjeuner d'affaires est utile, à cause de la relation qui unit les sentiments et l'estomac. » (p112)
« Ne vous plaignez jamais du client à caractère difficile, car il est la cause de vos progrès. Traitez les autres mieux encore : ils sont la raison de vos bénéfices. » (p112)
« Eviter ceux qui parlent de leur honnêteté : ils vous roulent. Traitez avec qui se vante d'avoir roulé autrui : c'est qu'il n'en a pas l'habitude. » (p114)
« Méfiez-vous de l'homme qui parle pour ne rien dire. Ou il est stupide et vous perdez votre temps, ou il est très fort et vous perdez votre argent » (p115)
« La concurrence est un alcaloïde : à dose modérée, c'est un excitant ; à dose massive, un poison. » (p119)
« Pour triompher, il faut être en avance d'une heure sur le concurrent et parler une heure après lui » (p119)
« La chose la plus répandue parmi les techniciens, c'est la conscience professionnelle. On en a trop profité pour les mal payer » (p123)
« Il y a trois manières de se ruiner, disait le grand Rotschild : le jeu, les femmes - et les ingénieurs. Les deux premières sont plus agréables - mais la dernière est plus sûre. » (p124)
« Il faut toujours se servir des experts, et prendre leur avis. Mais quand on l'a, on peut le garder pour soi. » (p125)
« Ayez de la bonne humeur. L'idée, c'est la semence : le travail la fait lever ; mais la bonne humeur, c'est le soleil qui la fait mûrir. » (p162)
« On peut se servir de la théorie pour choisir l'acte qu'on va accomplir : c'est de la sottise. On peut aussi s'en servir pour justifier l'acte qu'on a accompli : c'est de l'habileté. » (p162)
« Un dirigeant de société, causant avec des personnes étrangères à la société, ne doit pas dire : " Je ", mais " Nous ". Car une des forces de la société vis-à-vis des tiers est d'être un groupe.
Un dirigeant de société causant avec ses subordonnés ne doit pas dire : " Nous " mais " Je ". Car une des forces de la société vis-à-vis d'elle-même est d'avoir un chef. » (p163)
« Parlez peu, après les autres, et que ce soit pour dire quelque chose. » (p164)
« Une Société ne marche pas avec des règlements établis une fois pour toutes : c'est une création incessante. Si le monde marche mal, c'est que Dieu, après qu'il eut créé le monde et fixé ses lois, a cru qu'il pouvait se reposer. » (p171)